La conférence a débuté par la projection de la vidéo « Imaginons un monde à +4°C » qui tire le signal d’alarme sur l’interdépendance entre le climat et la sécurité environnementale ainsi que sur le risque de pandémies. La réalité confirme aujourd’hui les données scientifiques mises en images par cette vidéo, primée trophée d’argent au Festival Deauville Green Awards.
Si l’ampleur des phénomènes dans le scénario le plus sombre d’un réchauffement à +4°C reste difficile à anticiper, les signaux, déjà visibles, nous pressent à nous préparer et à agir dès aujourd’hui, pour atténuer et s’adapter. Le dérèglement climatique impacte l’eau en tant que ressource mais également la biodiversité et tous les usages de l’eau. L’eau est le marqueur du dérèglement climatique rappellera Jean Launay, par ses excès ou par ses manques. Les sept comités de bassins métropolitains ont adopté un plan d’adaptation. Par grande région, ils identifient les phénomènes auxquels il faut se préparer d’ici à 2050. Les mesures pouvant être déployées dans ce contexte sont souvent classées en trois catégories : mesures douces, immatérielles et institutionnelles, mesures vertes, fondées sur la nature, et mesures grises basées sur les infrastructures et la technologie. Guillaume Choisy, Directeur général de l’Agence de l’eau Adour-Garonne, a rappelé que s’adapter au changement climatique ne consiste pas uniquement à s’ajuster par rapport à aujourd’hui. Il faut véritablement transformer les activités et les modes de vie. Sans effort conséquent dans le domaine de l’atténuation et sans déploiement à grande échelle de ces mesures, ce sont les objectifs environnementaux et socio-économiques qu’il faut reconsidérer. « Adaptation ne signifie pas résignation mais invite à l’absolue nécessité d’agir, sur tous les fronts » indique Jean Launay, avant de rappeler les grands axes retenus par le processus des Assises de l’eau instigué par le gouvernement en 2019 pour le grand cycle de l’eau: économiser l’eau, protéger l’eau, partager l’eau et promouvoir massivement les Solutions fondées sur la Nature.
A la peine aujourd’hui partout dans le monde, les fleuves révèlent la fragilité de la relation des hommes à la Nature, au moment où nous faisons face à des défis climatiques, démographiques et environnementaux inédits. Faire des fleuves un allié essentiel pour demain est l’ambition d’IAGF collectif d’acteurs international et pluridisciplinaire, qui vise à mieux faire connaître et reconnaître le rôle des fleuves et développer des solutions au plus près des besoins. Via une plateforme en ligne ouverte à tous, IAGF présente plus d’une trentaine de solutions innovantes et efficientes, développées par les membres de l’association ou partenaires, pour accompagner les gestionnaires fluviaux dans l’adaptation de leurs pratiques. Erik Orsenna, son Président, a appelé lors de la conférence, à une gestion solidaire de ce commun qu’est le fleuve, voire à réinventer notre modèle démocratique, aujourd’hui impuissant à répondre à la rareté de la ressource.
Créer de l’eau là où est la vie, notamment pour les populations isolées et affectées par le réchauffement climatique, telle est la vision de Mascara Nouvelles Technologies, entreprise spécialisée dans la production d’eau douce abordable, à l’aide d’énergies renouvelables. OSMOMUN, première gamme au monde de dessalement 100% au fil du soleil, produit entre 1 et 5.000 m3 d’eau douce par jour à l’aide de l’énergie solaire et sans batterie. Quentin Ragetly, Président de Mascara, rappelle que l’entreprise cultive une approche originale combinant besoin en eau et production ENR de réseaux électriques à l’échelle de territoires isolés. Mascara poursuit ses travaux de développement et d’innovation pour accroître l’accessibilité de tous au dessalement d’eau et offrir une solution sans prérequis, abordable, sobre et soutenable.
Dans le cadre du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA), le CNES a reçu un financement pour développer le système spatial SWOT (Surface Water and Ocean Topography) en coopération avec la NASA. SWOT permettra d’accéder aux variations spatio-temporelles des hauteurs d’eau des grands fleuves, des lacs et des rivières. Un des objectifs visés est d’accompagner le développement d’indicateurs dans le domaine de l’eau à partir des futures données SWOT et de différentes missions spatiales en complément des données in-situ et des modèles. Dans ce contexte, le CNES a mis en place un programme d’accompagnement (SWOTaval) visant à élaborer des produits adaptés aux besoins utilisateurs s’intégrant dans les services existants ou à venir, mais aussi à préparer les acteurs de l’eau à l’utilisation de ces données issues du spatial. Depuis 2013, la maturité des produits spatiaux en hydrologie a beaucoup évolué sous l’impulsion du programme européen Copernicus et, au niveau national, du pôle thématique des surfaces continentales THEIA et du programme préparatoire SWOT-aval. Ces développements sont mis à disposition du Space Climate Observatory (SCO). Le SCO est une initiative qui rassemble l’expertise d’agences spatiales du monde entier pour mettre à disposition des données satellitaires, qui vont permettre de modéliser les impacts du changement climatique sur un territoire précis. Durant l’événement, Jean-Yves Le Gall a rappelé que « Grâce au développement du spatial depuis les années 60, l’observation de la Terre depuis l’espace permet de suivre quasiment en temps réel les phénomènes naturels ou anthropiques en différents lieux de la planète et à différents instants. Les technologies spatiales permettent donc d’assurer un suivi quantitatif et qualitatif de la ressource en eau, au-delà des frontières et des territoires, accompagnant ainsi les acteurs vers une meilleure gestion des ressources. »
143 litres par habitant et par jour, c’est la moyenne de consommation d’eau à la maison d’un Français aujourd’hui, alors qu’à la fin du XIXe siècle, elle ne dépassait pas les 20 litres journaliers. Et cette dépense domestique ne représente que 10% des prélèvements d’eau douce en France. 70 % des prélèvements d’eau douce au niveau mondial se cachent dans la production de nos aliments, 20 % dans la fabrication des produits industriels. Heureusement, et comme le souligne Mathilde Imer, Co-présidente de Démocratie Ouverte et Membre du Comité de gouvernance de la Convention Citoyenne pour le Climat, « pour préserver ce bien, chaque citoyen a à sa portée de nombreuses actions qui peuvent lui permettre de réduire drastiquement son empreinte H2O. Surtout, selon elle, les citoyens peuvent être des acteurs forts du changement, aux côtés des élus et des acteurs privés. L’exercice réussi de démocratie participative de la Convention Citoyenne pour le Climat l’a démontré. Il reste aujourd’hui à multiplier ces outils car les démocraties ont des difficultés à gérer les questions de long-terme comme le climat. Une autre priorité est de les décliner sur les territoires, pour intégrer des problématiques spécifiques comme l’eau. »
Malgré l’alerte de la communauté scientifique, les engagements globaux en termes d’émissions de gaz à effet nous mènent à ce jour sur la trajectoire d’un réchauffement global en moyenne entre +3°C à +3,2°C d’ici la fin du siècle. Si rien n’est fait pour freiner ce réchauffement, le nouveau régime climatique induira des défis importants en ce qui concerne la gestion des ressources en eau dans un grand nombre de territoires. De ce fait, des mesures concrètes doivent être mises en œuvre afin de tendre vers une gestion intégrée et durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques et un accès pour tous. Pour relever les défis à venir, le PFE référence, sur le portail Water Expertise France, l’expertise des acteurs publics et privés du monde de l’eau engagés à l’international. Il fait partie de la gamme d’outils WeFrance, pour la promotion des savoir-faire français de l’eau à l’international, une initiative du PFE et de l’Association scientifique et technique pour l’eau et l’environnement (ASTEE), coordonnée par le PFE.
- Programme complet Conférence « Un monde de l’eau à +4°C
- Dossier de presse Conférence « Un monde de l’eau à +4°C
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