Ces annonces confirment la mobilisation de la France en faveur de la solidarité internationale, notamment sur les sujets des jeunesses, du climat, des droits humains, de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la santé, de l’éducation, et de l’alimentation. Si certains services sociaux de base, essentiels au développement, sont bien présents dans les objectifs du CPD, il est à regretter que l’eau et l’assainissement soient les grands absents, alors même que l’amélioration de la gestion de l’eau et de l’assainissement est l’une des priorités sectorielles de la loi de développement solidaire du 4 août 2021 (LOP-DSLIM) et est l’un des piliers de la politique de développement de la France.
Mais où sont les organisations de la société civile ? Les ONG de solidarité internationale françaises mais également les ONG des pays partenaires, par leur proximité et leur engagement auprès des populations, sont de véritables porte-voix des sociétés civiles. Or, elles sont totalement absentes de la stratégie esquissée. Parce qu’elles sont aussi les « visages » de la solidarité internationale, à travers leurs actions, leurs plaidoyers, les millions de personnes bénévoles, volontaires et salariées, en France et à l’international, ainsi que les organisations et personnes destinataires de l’action pour le développement. Elles sont, de facto, expertes de la solidarité et actrices dans la définition, la mise en œuvre et le suivi de la solidarité internationale. Leur action, notamment humanitaire, est encadrée par des principes et le droit international humanitaire qui permettent aux acteurs et actrices de la solidarité internationale de répondre aux besoins des plus vulnérables, sans discrimination. Il est important que la France continue de porter et défendre ces principes.
Par ailleurs, s’il est rappelé les efforts financiers engagés par la France jusqu’en 2022, la trajectoire future des financements est cependant éludée, au moins jusqu’au CICID. Les engagements de la France sont pourtant clairs sur ce sujet. La loi du 4 août 2021 sur le développement solidaire, affiche l’objectif d‘une trajectoire visant à allouer 0,7 % du revenu national (RNB) de la France à l’aide publique au développement (APD) en 2025. Cette augmentation doit permettre de mettre en œuvre la loi en finançant prioritairement les pays les moins avancés, les organisations de la société civile, les services sociaux de base (santé, éducation, alimentation, eau et assainissement), la réponse aux crises climatiques et humanitaires, l’égalité de genre et l’implication des jeunesses.
Si parmi les 10 objectifs fixés nous saluons la place allouée aux droits des femmes et à l’égalité femmes-hommes, ainsi qu’au soutien des organisations féministes, la France aurait pu rappeler qu’elle met en œuvre une diplomatie féministe – et en faire sa priorité. Là encore, la politique de solidarité internationale française doit être guidée par la LOP-DSLIM, laquelle fait également de la promotion de l’égalité entre les filles et les garçons l’une de ses priorités.
Le Président a fixé l’objectif d’atteindre d’ici 2027, 3 000 jeunes engagés pour la solidarité internationale par an. Une avancée positive pour la solidarité internationale, ouvrant de nouvelles opportunités pour les jeunesses installées en France. Les jeunesses nécessitent toutefois une compréhension plus globale, intégrant les jeunesses des pays destinataires des projets et de l’APD, promouvant les droits humains des jeunes et des enfants, et une approche des jeunesses actrices de la solidarité. Les postes annoncés relèvent davantage que de la politique interne de la France et ne bénéficient pas directement aux pays destinataires de l’APD. Il faut par ailleurs rappeler que la politique de solidarité internationale est orientée par plusieurs politiques et outils essentiels : en premier lieu, la loi de développement solidaire du 4 août 2021, ainsi que la diplomatie féministe et sa déclinaison opérationnelle à travers le fonds de soutien aux organisations féministes, et enfin l’Agenda 2030 et ses objectifs de développement durable.
La solidarité internationale doit continuer d’être guidée par ces fondamentaux, intégrant les partenaires privilégiées que sont les ONG. Pour cela, la récente loi de 2021 sur le développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales doit être appliquée, sans rouvrir des débats déjà tranchés, tels que celui de l’assujettissement de notre politique de développement à des enjeux migratoires ou commerciaux propres à la France, au risque de détourner l’aide publique au développement de son essence même.